Après la mort de celle qui fût la reine de Paris, Le Monde évoquait un style imposé et qui s’imposerait encore à plusieurs générations. Le New York Times consacrait à sa disparition trois colonnes à la une et concluait que son influence était “incalculable”.

Le génie de Coco Chanel a bouleversé la mode et a marqué l’histoire de son empreinte.

 

Il était une fois Gabrielle Chanel 

Gabrielle Bonheur Chasnel, plus connu sous le nom de « Coco Chanel » naît à Saumur, en France, le 19 août 1883, sous le signe du Lion.

Naît d’un père, Henri-Albert Chasnel marchand ambulant, et d’une mère, Eugénie Jeanne Devolle, lingère et repasseuse. Coco à cinq frères et soeurs.

Sa mère mourra prématurément à l’âge de 32 ans (1895) épuisée par des grossesses successives, la tuberculose, et le travail qu’elle effectuait sur les marchés de Paris.

Après la mort d’Eugènie, le père de Gabrielle abandonne ses cinq enfants et dépose en carriole ses trois filles à l’orphelinat. La fillette n’a alors que 12 ans, elle ne le reverra jamais.

 

Un orphelinat derrière les murs d’un couvent

Où Gabrielle passa presque sept années. L’abbaye d’Aubazine ; c’est dans cet univers monacal et austère que Gabrielle va puiser son goût pour les vêtements épurés, pour le noir et le blanc.  C’est ici également qu’elle apprendra la couture. C’est dans les vêtements religieux et les objets liturgiques que va naître sa fascination pour le baroque, les pierres de couleurs, et l’or.

 

Une jeune fille qui le jour travaille le tissu, et la nuit chante dans un cabaret 

C’est là qu’on la surnomme « Coco », parce qu’elle chante souvent « Qui qu’a vu Coco dans le Trocadéro ». Elle prétendra toujours que « Coco » était le surnom que son père lui avait donné. Ce père à qui elle a toujours voué une adoration, bien qu’il l’ait abandonné.

 

Une jeune femme aux allures de garçon

Elle a déjà un style inimitable, qui dénote, elle s’inspire du vestiaire masculin.

C’est chez Étienne Balsan, officier qui vient de quitter l’armée, qu’elle va séjourner pendant presque une année. Il va lui faire découvrir la vie de château au domaine de Royallieu près de Compiègne. Il restera son ami de toujours.

Pendant presque un an à ses côtés Gabrielle va apprendre les codes et les usages de la haute société, et commencer à se faire tout doucement un nom. Elle confectionne pour les amis de Balsan, des chapeaux qu’elle défait de leurs plumes pour les rendre plus simples, plus légers, plus chics.

 

Un grand amour du nom d’Arthur Capel

Surnommé « Boy ». Il est anglais, cultiver et riche, il sera l’homme de sa vie. Elle deviendra sa maîtresse en 1909. Il lui fait découvrir les grands textes, l’orient et l’ésotérisme. Il aide Coco à devenir Chanel. Lui permet d’ouvrir ses premières boutiques à Paris, Deauville et Biarritz.

Boy mourra dans un accident de voiture en 1919. Ce sera la première fois que l’on verra Gabrielle pleurer, et la dernière. Elle dira « ou bien je meurs aussi, ou bien je continue ce que nous avons commencé tous les deux ».

 

21 rue Cambon – Le début d’un empire ! 

1910. Gabrielle Chanel ouvre sa première boutique de chapeaux « Chanel Mode » dans le premier arrondissement de Paris.

Ses chapeaux ont contribué à faire sa réputation. Bientôt la façon simple qu’elle a de s’habiller  fait sensation et est imitée par le Tout-Paris.

1913. Gabrielle Chanel ouvre sa deuxième boutiqu
e, à Deauville. Elle y présente sa ligne de vêtements en jersey. Qui révolutionne la relation que les femmes entretiennent avec leur corps. Le succès est rapide et sans appel.

1915. C’est à Biarritz que Gabrielle ouvre sa première maison de couture. Sa réputation est alors déjà bien installée.

1918. C’est au 31 rue Cambon que Gabrielle installe sa deuxième maison de couture. La petite paysanne est devenue la reine de Paris. Elle est Coco, Coco Chanel.

Elle révolutionne le monde de la mode, raccourcie les robes, dévoile les chevilles, libère la taille, jette les corsets. Chanel enterre une époque, et bouleverse la mode.

 

Anecdote

Les deux C entrecroisés reconnaissables partout dans le monde, le symbole absolu de Coco Chanel. Simples, dépouillés… Mais il semblerait que ces initiales étaient déjà utilisées dans le passé.

Catherine de Medici, Reine de France, femme coquette, avec un goût prononcé pour la mode.

Chanel aurait-elle voulu faire un clin d’oeil à la reine qui a enfermé les femmes dans
des corsets, quand elle, est la reine qui les en a délivrées ?

 

« Un parfum de femme à odeur de femme »

N°5 le premier parfum de Gabrielle Chanel, le parfum le plus vendu et le plus connu au monde. Il vit le jour en 1921, et ne cessera de passionner les foules.

Gabrielle Chanel bouscule les codes du monde feutré et très fermé des parfumeurs, en créant sa  propre fragrance. « Une femme devrait porter le parfum, partout où elle souhaite être embrassée », dit-elle.

Elle fait appel à Ernest Beaux, parfumeur à la cour des Tsars. Jasmin, Rose de mai, citron, aldéhyde, Muguet, Iris, musc, essence de néroli… Il compose pour elle un parfum de plus de 80 senteurs. Un parfum abstrait, mystérieux.

N°5 s’affranchit des noms pompeux des parfums de l’époque. Mademoiselle aurait choisi N°5 parce qu’elle préféra le cinquième échantillon présenté par le parfumeur. Selon d’autres dires, elle choisit le 5, son chiffre magique.

Pour la première fois, un parfum est vendu dans un simple flacon de laboratoire, sobre, austère, froid, minimaliste. Sa sobriété sera la garantie de l’indémodable, ce flacon traversera le temps.

Coco, pour N°5 bouscule les codes de la communication, elle pose elle-même pour la fragrance magique dans une suite du Ritz pour le Harper’s Bazaar. Andy Warhol consacrera une série de photos à N°5. Pour la première fois, un parfum apparaît dans un spot publicitaire en finale du Super Ball. Le succès de N°5 est incontestable, et démentiel. Marilyn Monroe contribue à la légende, quand au climax de sa carrière, elle déclare devant un journaliste « pour dormir, je ne porte que quelques gouttes de Chanel N°5 ». Le parfum instaurera la mode des égéries, Catherine de Neuve, Suzie Parker, Carole Bouquet, Nicole Kidman, Audrey Tautou, Gisèle Bündchen… Pour la première fois, un homme, Brad Pitt deviendra l’ambassadeur du plus féminin des parfums.

Un parfum naît en 1921, continue à écrire son histoire, et est le plus célèbre des parfums. Mademoiselle aurait-elle trouvé la formule de l’odeur féminine éternelle ?

 

Mademoiselle et la plus prestigieuse de toutes les pierres

« Si j’ai choisi le diamant, c’est parce qu’il représente, avec sa densité, la valeur la plus grande sous le plus petit volume ».

1932. Pour la première fois, une styliste met les pieds dans l’univers fermé de la joaillerie, elle présentera une collection de bijoux où le diamant sera à l’honneur, dans son hôtel particulier du 29 faubourg Saint-Honoré à Paris. Une collection intitulée « Bijoux de diamants ».

Les diamantaires de l’époque feront confiance à Gabrielle Chanel pour rendre sa splendeur à cette pierre.

La plus éphémère et la plus légendaire des collections. Mademoiselle allège les montures. ce n’est plus la pierre le point d’orgue, mais la ligne et le dessin. Elle supprime les fermoirs, ouvre les colliers, fait ruisseler des étoiles dans les décolletés, « je veux que le bijou soit aux doigts de la femme comme un ruban » dit-elle. Elle décroche des étoiles pour les mettre au cou des femmes « j’ai voulu couvrir les femmes de constellation ».

Gabrielle Chanel choisira 5 thématiques pour sa collection. 5, son chiffre magique.

Celle-ci sera la première et la dernière collection de hautes joailleries de Gabrielle Chanel. Mais la couturière aura pour toujours et jamais marqué le diamant de son empreinte. Éternellement, Chanel et le diamant.

 

Le temps d’une guerre 

1935. À 52 ans Mademoiselle est au sommet de sa gloire. Elle emploie 4 000 personnes, et possède cinq immeubles de la rue Cambon.

1945. Gabrielle baisse le rideau de sa maison de couture, après l’annonce de la Deuxième Guerre mondiale. Elle se consacre alors uniquement à son activité dans le domaine des parfums dont la boutique reste ouverte.

1944. La Libération, Coco Chanel est brièvement interrogée par un comité d’épuration des Forces françaises de l’intérieur (FFI), mais relâchée deux heures après. Winston Churchill, qu’elle connut en 1927, lors de sa liaison avec le duc de Westminster, serait intervenu en sa faveur.

Elle s’installe alors en Suisse au bord du lac Léman, où elle restera pendant 10 ans, tout en séjournant occasionnellement à Paris.

Pendant ce temps, à Paris, le « New Look » de Christian Dior fait fureur : taille de guêpe et seins « pigeonnants » obtenus par la pose d’un corset ou d’une guêpière. Elle est effondrée, tout son travail de libération du corps de la femme semblant alors réduit à néant.

 

Le grand retour 

Mademoiselle s’enrage de voir, la mode repasser aux mains des hommes, qui de nouveau  emprisonnent les femmes. Elle rappelle ses équipes, lève le rideau de la rue Cambon, et recommence à travailler. Elle a 70 ans.

Le 5 février, Gabrielle Chanel organise un défilé événement. Le 5, son chiffre magique encore et à jamais. Assise en haut des marches sur le célèbre escalier, elle se cache là, et observe ses modèles défiler. La presse française rit de son âge, et l’assassine. Les États-Unis en revanche l’encensent, le magazine américain Life écrit « à 71 ans Gabrielle Chanel rapporte mieux qu’une mode, une Révolution ». Coco Chanel retrouve sa puissance, elle impose à nouveau sa vision du style dans le monde entier.

Gabrielle Chanel poursuit son oeuvre. 

 

Puis vain la mort un 10 janvier 1971

Un dimanche seul jour où Chanel ne travaillait pas, la reine de Paris s’éteint. Elle avait dessiné sa tombe « 100 pierres au-dessus de moi, je veux pouvoir sortir si j’en ai envie, comme ça j’irais au paradis habiller les anges », avait-elle dit. Sa collection posthume sera un véritable succès.

« Que ma légende fasse son chemin. Je lui souhaite une bonne et longue vie ! ».

Grâce à son génie, l’éternel féminin sera à jamais incarné par la maison Chanel. Près de 50 ans après la mort de Mademoiselle, le style de la couturière demeure le symbole du chic parisien, grâce à la main de Karl Lagerfeld, qui ne cesse de l’enrichir, de le réinventer, de le sublimer.

Le noir. Le blanc. L’or. Le rouge. N°5. Le tailleur. Le sac matelassé. Le diamant. L’indépendance. L’inspiration. L’artiste. Avoir emprunté au vestiaire masculin des codes qui ont rendu les femmes plus féminines encore. Le simple. Le vrai. Le faux. L’esthétique. Le pratique. La soie. La dentelle. Le jersey. Le tweed. Le noble. L’exubérance. Le révolutionnaire. Le classique. Les fleurs. L’audace. L’élégant. LE PARADOXE, tel est la quintessence de Coco Chanel et de la plus légendaire des maisons de couture du monde.